mardi 31 juillet 2012

IMPORTANCE DE LA DICTÉE

Il faut environ 20 ans pour apprendre à écrire correctement (du CP à l'université). C'est à dire à peu près deux fois plus longtemps que pour apprendre à lire (du CP au collège).
C'est dire s'il n'y a pas de temps à perdre pour régler les questions d'orthographe et de grammaire de base du français.
La copie et la dictée quotidiennes (quatre par semaine pendant 5/6 ans) permettent ce lent travail de maturation de l'esprit. Par la confrontation avec des textes présentant des difficultés savamment graduées, l'orthographe s'acquiert progressivement (en fin d'enseignement élémentaire, les bases de l'orthographe sont définitivement maîtrisées).

D'autre part, la fréquentation d'auteurs d'une indiscutable qualité littéraire est une garantie de progrès constants dans l'acquisition de vocabulaire ; elle prépare l'élève à se forger un style de qualité pour son expression écrite

Nous conseillons aux parents l'excellente progression du Cours Hattemer

CP : mes premières dictées (dictées nécessairement associées à la méthode de lecture utilisée)
CE1 : dictées pour la 11è (identique à La bonne méthode de dictée)
CE2 : 100 dictées pour la 10è
CM1 : 100 dictées pour la 9è
CM2 : 100 dictées pour la 8è
6è : 100 dictées pour la 7è (chez Hattemer l'enseignement élémentaire dure 6 ans)

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in La langue française par la dictée
DESSAINT DOUILLET, RINGOT
Librairie Gedalge 1934



APPLICATION DE LA MÉTHODE (livre du maître)

I. LA DICTÉE. — La veille, le professeur lit la dictée. À la maison ou en étude, l'élève, se reportant à son propre livre, se remémore le sujet du texte lu ; il examine (mémoire visuelle); épelle (mémoire auditive) et écrit (mémoire graphique) les mots d'orthographe d'usage, étudie à l'aide du LEXIQUE le sens des mots qui lui sont signalés ; puis il revoit dans l'EXPOSÉ GRAMMATICAL, les règles dont il aura à faire l'application. En un mot, il prépare sa dictée. À l'heure du cours, le professeur relit le texte, s'assure par quelques interrogations que le travail de préparation a été consciencieusement fait ; puis il dicte le fragment. La curiosité de l'enfant, qui comprend, est en éveil ; son amour-propre est en jeu : muni des éléments fournis par son livre, il peut faire, il fait un excellent travail.

II. LES QUESTIONS COMPLÉMENTAIRES. — Écrire une dictée sans y faire de fautes n'est qu'un premier pas dans l'étude du français : il faut maintenant pénétrer dans la vie même de la langue. Les questions complémentaires vont en fournir les moyens.

1° VOCABULAIRE. — Et d'abord, il importe que l'élève se familiarise avec les mots. ; c'est ce que permet l'exercice sur le VOCABULAIRE : décomposer les mots en détachant du radical les préfixes et les suffixes ; discerner les nuances de sens que ces éléments apportent ; reconstituer des familles en les rattachant au chef ; montrer les extensions ou les restrictions de sens d'un même terme ; signaler les doublets ; relever les différences légères de signification entre des mots, voisins de sens et improprement appelés synonymes : tout cela fait pénétrer au cœur même de la langue, donne des notions exactes et rigoureuses. L'esprit s'y enrichit et y prend des habitudes de précision. Désormais le mot n'est plus un vocable vague, employé par à peu près : c'est une monnaie d'une valeur indéterminée, dont l'élève ne se sert qu'à bon escient.

2° EXERCICES SUR LE VERBE.— Entre tous ces mots, il en est un qui a une importance plus considérable que les autres, parce qu'il est l'agent d'échange : c'est le VERBE. c'est lui qui établit les rapports entre les éléments de la proposition, qui fait passer l'action du sujet au complément, qui exprime l'état, qui véhicule l'idée ou traduit une façon d'être ; sans lui, les mots restent figés dans leur sens général ; avec lui, ils entrent en rapport, s'influencent les uns les autres : le verbe est le pivot de la proposition. C'est pourquoi nous lui avons fait une place proportionnée à son importance. On connaît d'autant mieux une langue qu'on en possède mieux les verbes.
Mais l'étude, il faut bien le dire, en est aride. Descendant su latin, le verbe français a hérité de flexions et de terminaisons qui groupent plusieurs sens dans une même forme : ainsi le voulaient les habitudes de synthèse du génie latin. En s'adaptant aux besoins de la langue française, le verbe latin s'est adjoint des formes auxiliaires, qui ont pour ainsi dire décomposé et séparé les idées juxtaposées dans l'antique forme latine : c'est ainsi qu'il porte l'empreinte du génie national, épris d'analyse. De là ce bizarre mélange de synthèse et d'analyse qu'un effort persévérant peut seul discerner ; de là aussi cette confusion de formes diverses, qui déroute l'esprit et nécessite une patiente étude.
Nous avons cru bon d'adopter, dans l'étude du verbe, le cadre tracé par le récent arrêté ministériel ; nous avons donc gardé les divisions et les dénominations officielles : mais nous avons pensé que c'était là un minimum d'examen, et qu'il ne nous était pas défendu d'enrichir la matière. Ce qui importe avant tout, c'est d'exercer l'enfant à démêler sous des formes semblables des sens différents, c'est de former son esprit, c'est de faire, en un mot, œuvre d'enseignement.

3° ANALYSE.— Il faut ensuite habituer l'élève à désarticuler les phrases, pour en distinguer les éléments et pour en voir les points d'attache. La pensée ne se comprend bien que si on la décompose ; elle s'exprime en une suite logique de raisonnements qu'il faut retrouver. Rien de plus facile, pour y réussir que de détruire l'édifice pour le reconstruire ensuite. Ici et encore, nous nous sommes conformés aux instructions ministérielles. Nous avons délibérément renoncé à la distinction routinière et surannée de l'analyse grammaticale et de l'analyse logique, comme si toute analyse bien faite n'était pas logique ! Il n'y a, en réalité qu'une analyse : si le mot a une fonction dans la proposition, la proposition a une fonction dans la phrase ;  elle sera donc, elle aussi, sujet, complément, apposition, etc... Et ainsi, l'analyse se ramène à l'unité et à la simplicité : elle est fondée en raison et en logique.

4° COMMENTAIRE DU TEXTE.— Il reste maintenant un dernier pas à franchir. L'enfant a pénétré dans le vocabulaire de la langue ; il a fait du verbe une étude approfondie ; il connaît la structure des phrases ; il doit enfin -et tout le travail antérieur l'y prépare,- chercher à comprendre la pensée de l'auteur, à apprécier son style. Les questions du Commentaire exerceront l'élève à dégager de la dictée les idées essentielles, à justifier le choix de tel mot, de telle expression, à caractériser le style de l'écrivain, à voir ce qui en fait le mouvement, la couleur, la poésie. Ici l'effort est difficile, mais c'est aussi le plus fécond pour l'éveil de la pensée et de la culture du goût. (voir la préface du livre de l'élève).


CONCLUSION

Telle est notre œuvre.
Après l'avoir consciencieusement élaborée à l'aide des meilleurs instruments de travail, nous la présentons avec confiance à nos collègues, heureux si nous pouvons les aider à former des esprits justes, précis, des volontés habituées à l'effort, des intelligences capables de goûter vivement une belle pensée revêtue d'une belle forme.

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CONSEILS (livre de l'élève)

Jeune élève,

Voulez-vous que la dictée soit pour vous un travail intéressant et fructueux ? Écoutez-nous bien et suivez nos conseils.

I. AVANT LA DICTÉE

Une dictée doit être préparée : elle ne peut être faite sans étude préalable qu'à titre d'épreuve et de loin en loin. En quoi donc va consister votre tâche ?
1° Soyez très attentif quand votre professeur vous lit le texte pour la première fois, afin d'en comprendre le sens général, de saisir l'enchaînement des idées.

2° Epelez les mots d'orthographe d'usage, épelez-les une deuxième fois en fermant les yeux, puis écrivez-les : vous éviterez ainsi ces fautes inexcusables, uniquement dues à l'étourderie si funeste aux progrès.

3° Étudiez à l'aide du LEXIQUE, soit à la maison, soit en classe, le sens des termes que nous vous indiquons aux définitions et explications ; regardez bien l'étymologie qui est l'acte de naissance des mots ; elle vous dira d'où ils viennent et qui ils sont.

4° Apprenez enfin dans l'EXPOSÉ GRAMMATICAL les règles de grammaires auxquelles nous vous renvoyons, car vous aurez à les appliquer pendant la dictée.


II. LA DICTÉE

Et maintenant, vous voilà prêt.
1° Écoutez bien la seconde lecture que le professeur vous fait du texte : elle est plus importante que la première, car votre attention en éveil va reconnaître au passage les mots déjà étudiés, et les difficultés entrevues la veille vont à présent se préciser et de résoudre.

2° Le maître dicte. Rappelez vos souvenirs : vous ne devez plus vous tromper aux mots d'usage que vous avez épelé et écrit, - aux termes que votre LEXIQUE vous a fait connaître et comprendre- ou aux mots qui relèvent d'une règle que votre EXPOSÉ GRAMMATICAL vous a remise en mémoire.
Tous vos outils, petit ouvrier, sont entre vos mains. à vous maintenant à faire preuve d'intelligence, de réflexion et de bon vouloir.


III. APRÈS LA DICTÉE

Mais il ne suffit pas d'écrire une dictée sans faute. Il faut à présent que vous tiriez parti du texte pour augmenter vos connaissances, former votre jugement, cultiver votre goût. De là, la nécessité du devoir complémentaire. Ce devoir comprend toujours quatre séries de questions. Quelles sont-elles et comment devez-vous vous y prendre pour les bien traiter ?

1ère SÉRIE : Exercices sur le vocabulaire. -Que vous demande t-on ici ? D'étudier la vie de la langue, l'origine des mots, leurs diverses significations, les sens nuancés de ceux qu'on appelle improprement synonymes. Consultez le LEXIQUE, après avoir cherché dans LA VIE DE LA LANGUE FRANCAISE l'explication des faits qui vous sont signalés.

2ème SÉRIE : Exercices sur le verbe. - Faites une étude approfondie du verbe, qui est peut-être le mot principal de la langue ; apprenez avec soin les types essentiels de conjugaison, l'emploi des modes et des temps, les formes et les sens des verbes, et consultez pour ce travail, l'EXPOSÉ GRAMMATICAL.

3ème SÉRIE : Exercices d'analyse. Rendez-vous compte aussi de la nature et de la fonction des mots dans les propositions, de la nature, de la fonction et de l'enchaînement des propositions dans la phrase. Consultez à nouveau l'EXPOSÉ GRAMMATICAL : Il contient tout ce qu'il vous est nécessaire de connaître sur ce point, pour faire œuvre vraiment intelligente.

4ème SÉRIE : Commentaire du texte. — Faites maintenant un dernier effort. D'abord, pénétrez-vous bien de l'étude présentée dans ce livre sous le titre POÉSIE ET IMAGES et complétez par des NOTIONS SUR LA VERSIFICATION. Puis, tâchez de comprendre la pensée intime de l'écrivain, la logique de son raisonnement, de ressentir ses propres impressions, d'apprécier les qualités de son style. Que rien de ce qui fait la valeur de ces pages ne passe inaperçu, ne reste incompris, ne vous soit indifférent.
Jeune élève, nous avons voulu vous donner à travailler une belle et bonne matière. Notre récompense est dans l'espoir que nous contribuerons, dans quelque mesure, à vous faire acquérir un jugement et un goût plus sûrs, une pensée plus précise, des habitudes d'effort personnel et de réflexion.

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PRÉFACE

De tous les exercices scolaires, la dictée est peut-être le plus utile, et tous les arguments qu'on a invoqué contre elle ces dernières années s'adressent moins à l'exercice en lui-même qu'à la manière dont il est compris dans les écoles et corrigé dans les commissions. De la correction par les commissions nous n'avons pas à nous occuper. La Circulaire ministérielle du 27 avril 1891 rappelle aux membres des jurys d'examen que les fautes doivent être pesées plutôt que comptées, qu'il faut renoncer à une rigueur absolue dans tous les cas où il y a doute ou partage d'opinion, où la logique donne raison à l'écolier contre l'usage, lorsqu'enfin la règle à appliquer est sujette à caution. Quant à la manière dont la dictée était préparée et conduite, il faut bien avouer qu'elle prêtait souvent à la critique. S'appuyant sur cette idée que la dictée a pour objet d'apprendre avant tout l'orthographe et la grammaire, certains maîtres ne se préoccupaient guère que d'accumuler dans une page d'un français souvent douteux le plus grand nombre de difficultés possibles, et toute la correction consistait à épeler les mots les moins usuels ou servant à l'application d'une règle de grammaire. Tout se bornait donc à une besogne machinale pour le maître, fastidieuse et stérile pour l'élève, qui n'apprenait à connaître que l'enveloppe des mots. Or, c'est singulièrement restreindre l'importance de la dictée que de réduire à un exercice d'orthographe. Elle peut et doit être un procédé de culture intellectuelle et morale. Morale, elle sert à inspirer le goût du bien, à faire comprendre et aimer le devoir ; elle familiarise avec les sentiments élevés. Utile à l'éducation, elle ne l'est pas moins à l'instruction ; car, en se diversifiant, elle devient l'auxiliaire de toutes les matières de l'enseignement, littérature, histoire, géographie, sciences, et à tout moment elle fournit l'occasion de développer le jugement et le goût.
"Pour être bien orthographiée, la dictée veut être bien comprise. Or un morceau n'est pas un tas de phrases détachées ; c'est un tout qui a un commencement, un milieu et une fin ; ce n'est pas un amas, une juxtaposition d'idées incohérentes, c'est une suite et un enchaînement. De même que les mots sont unis entre eux dans la phrase par des rapports grammaticaux, ainsi les phrases sont unies entre elles par les liens étroits du raisonnement et de l'association des idées. C'est à faire découvrir ces liens que le maître doit exercer les élèves ; en les habituant à trouver la suite des idées dans les écrits des autres, il les habitue, la là même, à mettre de l'ordre dans leurs propres idées, et l'exercice qui impose quotidiennement cette recherche et l'effort qu'elle implique, peut être à bon droit considéré comme un exercice de jugement par excellence" (M. Vessiot - dictée aux examens et à l'école - 5 mai 1890).

Enfin, si les morceaux sont bien choisis, la dictée contribuera à former le goût ; elle fera faire connaissance aux élèves avec nos écrivains les meilleurs et leur fournira un fond de lectures. En un mot l'exercice de la dictée, loin d'être une besogne routinière, peut et doit être, pour le maître comme pour l'élève, la répétition de l'exercice utile et fécond entre tous, la lecture expliquée.

C'est dans cet esprit qu'est conçu notre recueil. les textes en sont empruntés à nos plus grands auteurs ou à des écrivains distingués. On les a variés avec le plus grand soin, non seulement pour enrichir le vocabulaire des élèves, mais aussi pour assouplir et ouvrir leur esprit. Telle page est le développement d'une idée morale, telle autre un tableau propre à éveiller leur imagination ; à côté d'un portrait historique ou littéraire, d'une description géographique, se place une anecdote ou un récit. Chaque morceau est suivi de quelques lignes qui en dégagent la pensée dominante, marquent l'enchaînement et le progrès des idées, ou aident à l'intelligence du texte ; puis d'un commentaire portant sur la signification des mots ou sur des observations de langue et de grammaire. En effet, quoique la dictée ne soit pas un simple exercice grammatical, elle n'en est pas moins une épreuve de langue ; elle doit montrer si l'élève écrit correctement le français, s'il en connaît bien les lois. Nous avons donc fait, dans le commentaire, une large place aux questions de langue, aux règles de lexicologie et de syntaxe, tout en renvoyant, pour les détails, aux ouvrages plus développés. Enfin nous avons fait suivre chaque dictée de questions de grammaire auxquelles il devra être répondu par écrit, et que le maître complétera par un questionnaire sur la signification des mots, sur quel tour employé par l'écrivain, sur l'enchaînement des idées, afin de s'assurer à la fois du degré de connaissances et d'intelligence de ses élèves. Disons en terminant que notre commentaire n'est ni complet ni définitif. Il appartient aux maîtres de l'étendre, de le restreindre, de multiplier les questions suivant les besoins et l'instruction de sa classe. Pour nous, nous n'avons voulu qu'indiquer la méthode à suivre pour faire porter à l'exercice de la dictée tous ses fruits, c'est à dire pour en faire non seulement l'auxiliaire des études grammaticales, mais un instrument de culture intellectuelle et morale.

Raoul PESSONNEAUX
Agrégé de l'Université,
Professeur honoraire au Lycée Henri-IV et à l'École normale supérieure de Fontenay
in 150 DICTÉES PRÉPARATOIRES
au brevet élémentaire et aux divers examens.
Fernand NATHAN 1939